Les guerres que l’on gagne, les combats que l’on perd
Je pense que ceci sera le dernier billet que j’écrirai ici non par lassitude, mais comme une conclusion de ce blog qui m’a accompagné avec vous tout au long de ces presque trois ans de maladie, je n’arriverai pas au troisième anniversaire de Carlo, et ça n’est pas plus mal. Trois ans après le diagnostic mais on peut sûrement sans se tromper ajouter ne bonne année au début du cancer.
Il n’est pas question d’adieux ici, les adieux sont pour les gens qu’on aime, ici c’est juste un terrain de jeu, un essai de réflexion, un espace de recul sur ce qui s’est déroulé avec ou sans mon consentement.
Lorsque le mois dernier après un retour de voyage chaotique mon généraliste a prescrit une IRM cérébrale, je savais sans y croire que nous allions changer de terrain de jeu. Le mercredi 16 mars à 15 h j’ai donc appris qu’une métastase méningée avait été identifiée. Il a fallu encore quelques jours pour que mon oncologue parle de méningite carcinomateuse. Là je savais que le combat serait perdu, j’ai donc simplifié et demandé le passage en soins palliatifs.
J’ai trop d’expérience pour être naïve, inutile de m’infliger des soins invasifs, de nouvelles biopsies, pas même la ponction lombaire. Rien, je ne veux rien, que mourir dignement et le dernier combat c’est celui-là. Inutile de prescrire des analyses de sang ou n’importe quoi d’autre. Soulager les symptômes, les garder sous contrôle et tirer le rideau quand mon corps me lâchera, telle était ma demande auprès de l’équipe du CLB. Pourquoi a-t-il fallu attendre la fin du parcours pour rencontrer la crème de la crème des soignants ? Une énigme que je ne résoudrai pas, mais dont j’apprécie la réponse. Pour la première fois, je suis le traitement à la lettre, je suis devenue conciliante, je me laisse prendre en charge, je ne refuse rien, ni les hypnotiques, ni les antidépresseurs, ni les anti- tout et n’importe quoi, je me drogue avec application et ça me réussit bien. Je ne me départis pas d’une sérénité qui a remplacé l’état de panique de l’annonce où j’ai voulu mourir immédiatement vite et bien. J’ai appris à apprécier les longs temps de partage avec mes enfants et mon mari, leur père, j’ai même entrepris de terminer un projet de recherche, en adaptant mes outils au temps de cerveau disponible, aux éblouissements, à la photophobie, aux coups de pompes, à l’épuisement.
J’ai appris à lâcher prise pour de bon, adieu ma voiture, adieu mon autonomie, j’ai besoin d’aide et d’assistance et j’apprécie que les premiers qui aient répondus soient ceux que j’attendais. J’ai éconduit à nouveau quelques importuns, moins violemment qu’au début, je garde les fâcheux et les trop tristes à distance, je privilégie mon temps et mon attention pour les belles minutes et les bonnes personnes. Je dis au revoir de loin pour ne pas gâcher la vie des autres avec une fin qui viendra comme elle souhaite, je sais que je ne maîtrise plus grand-chose et je m’en moque.
J’attends la mort sereine, chez moi. Un chez moi qui n’est pas un hôpital, ni un mouroir, un chez moi intact en dehors de l’amoncellement de boites de médicaments, aucun signe de la maladie de visible et cela restera ainsi.
J’ai pris avec distraction ma demande de mise en examen, les miens se sont chargés avec d’autres de me défendre et continueront à monter la garde. J’ai donné mon dernier coup de pied dans la fourmilière du pinkwashing et de l’opacité des associations. J’espère que les médias feront leur boulot pour regarder en détail et avec recul la grande image de ce monde rose du cancer du sein. Mais je n’y fais plus attention.
J’ai réglé mes factures. Je peux partir le cœur léger. Aussi léger que lourd de laisser une déchirure dans le cœur des miens, mais je n’ai guère de choix.
Comme me l’a fait remarquer mon cher oncologue, je n’ai mené que les combats que je pouvais gagner, aucune guerre que j’ai perdue. Le cancer gagne toujours à la fin. Le problème c’est la date de fin sur la boite.
Voilà mes amis, je vous dis à plus tard, on se reparlera ou pas. Si j’en vois un de l’autre côté j’espère que ce sera Fred on pourra parler de cerveaux et de nos cancers, des spritz et de rigolade. J’embrasserai le garçon de la part de sa femme et de sa fille et je dirai crétin tu aurais pu attendre un peu, neuf mois que tu es parti et que je n’arrive pas à t’écrire.
Voilà mes amis le reste ce sera pour ma famille, nous on s’arrête ici.
Et en attendant vous pouvez guetter mes signes sur Cher Léon. Je n’ai pas encore lâché la rampe ni l’arbre.
Je vous lis depuis le début de la maladie. Je n’ai jamais osé m’adresser à cette grande dame que vous êtes sur twitter et dans la vie. Mais aujourd’hui je veux juste vous dire merci d’avoir été comme vous êtes : géniale.
Je vous souhaite de merveilleux moments en famille. Et merci de tout ce que vous m’avez apporté dans le savoir.
Je t’ai silencieusement lu pendant des mois pendant qu’un (très) proche vivait son combat contre son cancer.
Je viens de finir de dévorer ton livre que j’ai acheté quelques jours après la date de fin sur la boîte de son cancer.
Merci Manuela pour tes écrits et toutes ces choses que tu partages…
Merci infiniment…
Je te comprends, c’est aussi le chemin que je choisirai le jour où…
Alors, on se reverra?
Respect,….total respect…
J’ai lu ton livre quand j’ai perdu mon oncle adoré l’an dernier d’un cancer. Ton livre m’a énormément aidée à comprendre ce qu’il avait vécu, ton livre m’a aidée à le laisser partir malgré toute la douleur que j’avais. Merci Manuela pour tous ces écrits que tu nous laisses, ils sont importants.
Les paroles s’envolent, les écrits restent.
Ton dernier billet est digne, je n’ai plus de mots de peur d’etre ridicule, mais je suis de loin tes tweets.
Merci.
Bonjour Mme Wyler,
arrivé ici par le Pinkwashing et ce que vous en écrivez (1000% d’accord avec vous.. ), je découvre ce texte qui me touche au plus profond. Probablement pour avoir vécu cette situation avec mon père, j’envie vos enfants de pouvoir lire ce texte c’est un magnifique cadeau que vous leurs faites. Je vous souhaite encore pleins de bons moments.
Quelle belle rencontre ! Tes mots sont magnifiques et tu es magnifique de serenité. Mes pensées t’accompagnent. Bises
bonjour Manuela, je vous ai découverte il y a peu de temps et pourtant vous m’accompagnez un peu tous les jours, je vous souhaite de continuer votre chemin comme le souhaitez dans la douceur, l’amour ,et la tendresse de vos proches
Je vous embrasse
Quelle dignité Manuela!
Il n’y a rien à ajouter ou plutôt, si une chose: MERCI!
Que la Paix et l’Amour des tiens t’accompagnent où que tu soit…
Reine Linde ;)
Bonjours manuela votre histoire me rappelle celle de 2 de mes grands parents bravo d’avoir choisi une mort paisible et rejeté la vie de combat horrible cette dure fin me rappelle celle de ma grand mere (cancer cerveau ) et je pense que vos proche n’auront pas de mal a conprendre le choix d’une mort paisibles à un état de légumes bonne continuation en espérant sincèrement que vous ne soufrier pas
Très émue….je te souhaite tout l’amour des tiens pour que ce passage vers l’autre monde ne soit que douceur pour toi…
merci pour ton courage,….Je t’embrasse fort et à plus tard
Merci pour tout ce que vous faites et ce que vous êtes, surtout pour cette sérénité qui nous fait du bien, et pour votre merveilleux cherléon.
Je vous découvre ce soir
Merci de transmettre la vie avec tant d’amour, de lucidité et de sérénité
Bon voyage
Votre parole est un cadeau précieux qui m’accompagnera Merci
Good bye, farewell…
Amicales salutations, et que Dieu vous garde!
Merci pour tout Manuela . Vous êtes une personne exceptionnelle . Je garde une place pour vous dans mon coeur . Je vous embrasse affectueusement .
merci manuela pour votre bonne humeur votre resistance et j espere que vous trouverez la paix et la fin de vos souffrances!vous etes une tres grande dame et je me permets de vous embrasser!
Manuela, je te serre tout doucement contre mon coeur. Profite des personnes que tu aimes. Elles ont beaucoup de chance de t’avoir auprès d’elles. Merci pour tout. Tu es une grande Dame.
Merci Manuela pour les mots et pour les latkes et lâche la rampe le plus tard possible
En te lisant je sais que, là où tu vas, tu y as vraiment TA place …
Je souhaite de tout coeur que cette fin dont tu parles soit un commencement pour autre chose à vivre
dans la paix, la sérénité, la lumière … loin de toute souffrance …
c’est hautement mérité … je t’embrasse très fort
J’ai adoré vous lire, discrètement, silencieusement pendant tout ce temps. Merci pour votre prose, et votre courage
Légère comme une plume, douce comme un baiser… C’est comme ça que je t’ai toujours vue. Encore plein d’amour pour toi et les tiens <3
Merci Manuela pour le blog et les combats contre le Pink washing. Un jour, tu m’as appelée ta collègue parce que la maladie, c’est du boulot. Ce fut un honneur.
Au revoir, peut être
Bonjour Manuela. Que ce bout de chemin qu’il vous reste à parcourir soit fait de quiétude et de l’amour des vôtres.
bon voyage. Beaucoup de douceur et de chaleur autour de vous
C’est avec le coeur lourd que je vous écris. Je suis profondément affecté par la nouvelle, l’espoir faisant partie de nous lorsqu’un Carlo infiltrant nous accapare…Recevez tout l’amour, le courage pour faire face à cette lutte finale. Vos témoignages sont une richesse pour le corps médical et les patient(e)s.
Que cette fougue dont vous faites preuve ne vous quitte pas et que votre courage soit un exemple pour tous.
Que la paix et la force soient avec vous, Manuela. Pour toujours.
À très bientôt, ici ou ailleurs!
Tu es magnifique !
Merci Manuela, c’était un plaisir de vous lire, et de savoir maintenant que tout cette douceur vous entoure.