Martine Bronner a un blog rien qu’à elle il est là , je lui ai demandé de venir de temps en temps ici, parce que j’aime ce qu’elle écrit et que je pense que vous pourriez aimer aussi. Sa rubrique s’appelle Martine est ici aussi.
Le cancer a une couleur. Si,si … le cancer a une couleur.
Pour le sein, c’est rose. Pour le colon, c’est bleu. Pour rester cohérente avec la layette, j’aurais pris « bleu » pour la prostate. Vu que ça peut devenir une histoire d’ « eaux » et que pour essayer d’arranger les choses après on peut essayer la pilule bleue. Et surtout, c’est réservé aux garçons. Je sais bien que cela manque de poésie mais le cancer du côlon, je le voyais plutôt brun (en même temps le cancer n’est pas vraiment poétique). Ce n’est pas «rose » non plus pour certaines de mes amies qui préféreraient ne pas connaître la couleur. Qu’est ce que ce « rose » est gavant !
En plus de la couleur le cancer a un mois, le sien. Comme décembre est le mois de Noël et des cadeaux, octobre est le mois «cancer du sein» et «chimio».
Attention en octobre, on ne parle que de ça, rien d’autre.
Si les communicants continuent dans cette voie, il faudra inventer des mois pour que nous en ayons un pour chaque cancer :
Juillet jaune pour le mélanome :
– jaune pour soleil, juillet pour coup de soleil.
Vous voyez le rapprochement !
Et en plus, ça rimerait presque. Je serais communicante, j’en ferais une chanson et mon « juillet jaune » je le vendrais très cher.
Décembre vert pour le foie :
– vert pour la bile (brun c’est déjà pris), et décembre pour les coupes de champagne, le vin de messe…
(Alcool et foie si jamais vous étiez un peu long à la détente) Vous voyez le rapprochement !
Pour le poumon, je ne sais pas trop. C’est difficile car la chair n’est pas de toutes les couleurs….la chair est triste, dit-on. Pour le poumon je verrais bien une couleur « fumée » comme sur les paquets de gitane et ça collerait avec l’amiante aussi, genre blanc avec une touche de gris. Comme ça au moins le malade du poumon qui n’aurait pas fumé pourrait être de la partie.
Ah oui ! Le mois ! Disons « mai » pour le poumon avec ses allergies. D’une pierre deux coups, vraiment trop forte en communication.
Et quand je dis d’une pierre deux coups…Symboliquement très fort, on pourrait consacrer le mois d’avril (Pâques, vous voyez le rapprochement!) au cancer des ovaires et des testicules. Enfin nous serions ensemble, c’est beau. C’est juste un peu compliqué pour choisir la couleur !
LLe cancer du pancréas. Hyper dur pour la couleur. Je serais mauvaise communicante je prendrais un « violet », un « pourpre » profond, très profond…mais un communicant se doit d’être positif, dynamique, engageant…Un communicant oublierait le cancer du pancréas.
Et lui laisserait un tout petit mois. Février, et encore, juste les années bissextiles.
Associer le cancer du sein au « rose » layette ? Aux poupées «Barbie» ? Au mini short des pom-pom girl ? Aux robes de princesse en faux satin avec volants et nœuds ? Au lait fraise ? Une imposture. Il était une fois une petite fille, si gentille, si jolie dans sa petite robe rose. Elle rêvait bien des choses… Elle deviendrait femme, rencontrerait Ken qui la chérirait, la protégerait… elle aurait un cancer du sein… Le cancer du sein en tant que rite initiatique, accès douloureux à la féminité, repère identitaire…Souffrir, toujours souffrir et au-delà, rester belle et désirable pour que Ken m’aime encore.
Ouvrez une page « images » dans google pour octobre rose.
Des ongles roses, des nœuds roses, des flacons de parfum et des crèmes roses, des femmes jeunes et belles nouées de rose. Des soutiens-gorge roses…des produits de consommation surtout. De la consolation en monnaies sonnantes et trébuchantes.
Ah non là, une femme pas toute jeune, pas toute belle avec un gant de boxe rose bonbon pour se battre contre le mal rose, mais avec le sourire s’il vous plait.
Difficile de voir la vie en rose! Mais obligé !
Je hais cette couleur emblématique des femmes-enfants. La couleur d’un monde fade et artificiel de midinettes qui regardent de leurs grands yeux bleus eyelinés et papillonnants leur héros mâle et puissant.
Tiens, je verrais bien un bus-mammobile dans un affreux désert médical, réplique exacte du camping car de Barbie et Ken.
Je ne sais pas pourquoi mais le mammobile a une place particulière dans mon imaginaire, c’est sans doute en relation avec le bibliobus de mon enfance !
Ken conduirait le camping car en souriant de toutes ses dents blanches et Barbie serait heureuse aux côtés de Ken. Cancéreuse mais heureuse. C’est pas beau la vie ?
Plus de soixante ans de féminisme et en arriver là !