Iris : Soignante/soignée, choriste, blogueuse, indestructible, fan de Queen, de chocolat noir, et de la positive attitude. Le cancer c’est chiant est sa devise. Je me devais de l’inviter sur le blog et pas seulement pour sa devise.
Cela fait 35 ans que le cancer s’est invité dans ma vie ! 1981 : cancer du sein droit, tumorectomie, curage axillaire, radiothérapie, chimiothérapie, puis deuxième cancer du même sein, en 2011, mastectomie, reconstruction par prothèse sous pectorale, et puis sarcome sous prothétique en 2013, chirurgie, contrôle tous les trois mois, tous les 6 mois… Beaucoup de chirurgie sur ce coté droit, un gros délabrement axillaire, des chairs mutilées, une image corporelle qu’on assassine… Le bras droit bien plus gros que l’autre, du milieu du bras jusqu’au poignet avec sous l’avant une plaque de fibrose, un coude douloureux. C’est un lymphœdème.
Le lymphœdème, c’est de la lymphe qui s’accumule dans le bras, piégée par une route détruite, c’est une attention permanente, c’est l’interdiction de se blesser, de se ronger les ongles, de se piquer, sous peine de complications telles que lymphangite, cellulite, érésipèle.
La lymphangite c’est déjà pas mal mais l’érésipèle, c’est quelque chose !
J’ai expérimenté… hyperthermie, bras rouge, douloureux, des phlyctènes, la lymphe qui s’écoule par les pores… j’aime bien les expériences incongrues.
Pour éviter une surenchère du gonflement et de l’infection, plusieurs solutions :
– la surveillance du bras
– aucune d’injection, ni prise de sang, ni prise de tension, les gants de jardinage pour bricoler dans le jardin
– la gravité, logique et efficace à condition d’être capables ou avoir la possibilité de rester couchée 3 heures par jour avec le bras élevé à 30°. Les seuls moments où mon bras a diminué de volume c’est quand j’étais hospitalisée et allongée.
– le drainage lymphatique manuel ; tout le temps, tout le temps et toujours, ce que je ne fais pas bien entendu !!
– Enfin, le manchon de contention, accessoire tendance indispensable de la cancéreuse privée de ganglions.
Ah le manchon, quel plaisir ! Pénible à mettre, pénible à supporter, moche à voir.
Ca serre le bras, de l’épaule à la main, ça gratte, ça tient chaud. Quand on reste trop longtemps le bras plié, c’est douloureux au pli du coude. Mais c’est indispensable. Et puis évidemment ça se salit, ça se lave… donc il en faut plusieurs. Pour info c’est remboursé par la sécurité sociale. Mais juste 2 par an et il reste une somme à charge que votre mutuelle parfois à la gentillesse de vous rembourser.
Le manchon, c’est un « spécial nuit », à mettre en complément du manchon jour, glamour à souhait !
Autant le dire le lymphœdème c’est décourageant.
Sentiment d’impuissance et parfois peur de ce que ce bras va devenir, infection, complications…
Sentiment de solitude, les médecins ne savent pas toujours ce que c’est, ne prescrivent pas les drainages, ne donnent pas les antibiotiques adaptés. Le lymphœdème n’intéresse personne !
En société, c’est moche un bras plus gros que l’autre, cela se voit !
Le shopping, c’est démoralisant, il faut chercher le vêtement adapté, qui cache, ne serre pas et dans la manche duquel mon bras va entrer… facile !
Plus de soleil, heureusement il existe les crèmes auto-bronzantes.
Une note positive tout de même : fini les théories du passé qui interdisaient les mouvements répétitifs, les SPA, les sports. Oui, mesdames, vous pouvez faire du sport, vous pouvez bouger, aller faire une thalasso, vivre normalement et vous faire plaisir. Les 2 conditions sont de mettre une compression donc le manchon, et d’avoir à portée demain antiseptique pour désinfecter les petites blessures et antibiotique si hyperthermie. Et attention aux cuticules, terrible porte d‘entrée pour les bactéries en tout genre !
Les perspectives : peu nombreuses. On commence à parler d’intervention chirurgicale (anastomoser les ganglions piégés à une veine, autogreffe de ganglions pris ailleurs mais rien de bien tentant et peu de recul pour mesurer l’efficacité.
Le lymphœdème, c’est un rappel permanent du cancer, des étapes, des angoisses, des traitements et du fait qu’on ne sera plus jamais comme avant.
Le lymphœdème est un stigmate du cancer du sein et du curage axillaire.
Le cancer va prendre une place dans la tête qu’il va falloir organiser et gérer dit Martine Bronner dans un très joli article sur le Plan cancer 3, je rajouterai juste : toute la vie durant…
Et en complément tu peux lire le billet de Manuela qui est en classe lymphœdème débutante
Merci ma chère Manu pour ton invitation. Comme tu dis : le lymphoedeme et le cancer du sein, c’est une histoire à base de je te connais, je t’aime, je te hais, je te fuck mais tu es là, je fais avec…