Je suis petite je mesure 1,57m quand je me tiens droite et quand je me mets sur la pointe des pieds bras tendu après rééducation de la chirurgie des ganglions et de la mastectomie j’arrive encore à prendre un verre sur la troisième étagère du placard de la cuisine. J’ai élaboré plein de techniques pour palier à mes handicaps divers, la cuillère en bois à manche long pour faire glisser le paquet de sucre glace de l’étagère et l’attraper de la main libre par exemple. J’utilise une chaise en bois bien solide dans ma cuisine comme escabeau. Mais l’assise de la chaise me semblait un peu haute à atteindre ces derniers jours. Mes jambes n’arrivaient pas à me hisser ou plutôt je manquais de force et d’équilibre et devait m’y prendre à deux ou trois fois, je ne disais rien. Dans le garage j’ai deux escabeaux de tailles différentes dont les marches correspondent plus à ce que mes jambes sont encore capables de gravir. Aujourd’hui marque le jour où la tentative de la chaise s’est soldée par un échec. Cuisant. Encore une chose que je ne peux plus faire. J’ai pourtant essayé trois fois de grimper sur cette maudite chaise, rien, pas de force ni dans les jambes ni dans les bras accrochés à la porte du four. J’étais seule dans la maison, seule dans la cuisine et le bouton d’alarme est sagement rangé dans ma table de nuit. Je sais c’est stupide. J’ai évité la chute en abandonnant la tentative. J’ai attendu que le vertige passe , oui en plus j’ai des vertiges. Lorsque tout fut calme je suis allée dans le garage chercher un escabeau. J’ai grimpé les trois marches pris le paquet de lasagnes et après avoir sorti les plaques qu’il me fallait j’ai rangé le paquet sur la troisième étagère et l’escabeau dans le garage.
Il était 11 h ce matin lorsque j’ai compris que je pouvais rajouter à ma liste des #jenepeuxplus « grimper sur une chaise ». Il y avait eu l’épisode de l’échelle au lac du Bourget où j’ai eu un mal de chien à grimper sur le ponton, je n’avais pas trop commenté mais ça m’avait mise en pétard. Mouillé le pétard.
Certains me diront :
• Ça n’est pas grave mets les lasagnes sur la deuxième étagère,
• Sers-toi de l’escabeau
• Sors de l’eau par la plage de galets
Ou bien encore on me suggèrera de faire de la gymnastique pour me muscler et m’assouplir. Cela ne changera rien au fait que je ne peux plus faire un truc aussi banal que de grimper sur une chaise et que bien sûr comparé à des handicaps sévères je peux aller me rhabiller avec mes petits troubles dus à la méningite. Sauf que sur le moment tu n’y penses pas aux handicapés, tu penses à ta pomme et tu es un peu en colère, encore en colère. La colère du cancer tu connais ? C’est celle qui fait sauter les plombs une fois de temps en temps, pas toujours au bon moment, pas toujours face à la bonne personne. Mais ça libère de toutes les frustrations que tu endures depuis le début de ta maladie. La colère ne te rapportera rien, elle ne te rendra pas les #jenepeuxplus tu le sais mais néanmoins tu la gardes ta colère, elle te permet de tenir certains jours.
J’en ai une grande variété dans ma collection.
La dernière que j’ai rangée a été causée par le mari d’une amie cancéreuse, un type dénué de la moindre once d’empathie, il vit dans un pays froid ça lui va comme à un gant. Pour lui j’aurais pu retrouver un peu de force et lui asséner un coup de genou, à l’époque j’arrivais encore à lever la jambe. Mon amie a comme compagnon un homme qui n’est pas parti à l’annonce de la maladie, non sa lâcheté a été de faire comme si de rien n’était. RIEN, il n’a rien fait, ni coup de main dans la maison, ni les courses, ni les repas, ni le linge ni même s’enquérir de ses besoins. RIEN. Pas présent après la chirurgie, absent pendant les chimios, absent pour la radio. RIEN Ça m’a bien mis en colère, je ne le connais pas, ils vivent loin, très loin d’ici.
Elle s’en est sortie toute seule, elle a fait la brave, la forte celle qui fait face.
Pourquoi je vous parle de ça ? #Jenepeuxplus m’en souvenir. Pas grave, ça reviendra peut-être plus tard
Merci ma jolie pour tout ces mots ! Nous vie vivons la même chose a kec chose près. J’espère que côté cheminée ça commence à s’éclaircir. JE T’EMBRASSE DOUX DOUX DOUX
Bonjour,
J’ai, moi, quitté ma Kathie, que ma souffrance dérangeait ( et tu peux pas le ranger ton fauteuil, et tu peux les mettre ailleurs tes médocs, eh non on ne remontera pas les pieds du lit, hein t’as eu une phlébite, eh ben quoi …).
Moralité: le cancer change les gens, non, c’est faux, il les révèlent.
On n’assiste pas tous les jours à l’apparition demeurée masquée des signes d’une perversion narcissique bien camouflée par des années d’entraînement.
Du coup, j’ai fait et l’anamnèse et l’expertise amateur de Katie, et j’ai bien fait.
Je crois que cela arrive souvent, les ruptures pour cause de dysfonctionnement de l’image que l’on renvoyait.
Bah, plutôt presque seul que mal accompagné, pas le temps de s’attarder.
J’ai eu une pensée à votre intention, en passant prés, très prés, du Lac du Bourget, l’autre jour.
Ça bronze sévère à des heures inconscientes que l’andalou dont j’ai en partie les gènes fuit comme la peste.
J’ai viré un radiologue, je devrais vous raconter, cela vous ferait rire, je crois.
Un radiologue, un dentiste et un généraliste en plus de deux années, je reste raisonnable.
Quoique j’aurai envoyé paître mon oncologue de référence si je n’avais pas déménagé ( cause Katie).
Le temps que l’on passe à inventer des « trucs » pour pallier aux complications du quotidien, on se croirait dans une prison, ou autre lieu, où naissent des objets pratiques inattendus avec deux bouts de ficelle, et un peu de soudure au briquet.
Est-ce que cela ne vous énervait pas un tantinet ces compte-rendus de consultation où votre nom figure en gars, et où on vous nomme « le patient, ou la patiente » à tous les bouts de phrases ?
Objet, sujet …
Je ne crois pas qu’un jour se passe sans que de nombreuses pensées vous accompagnent.
D’accord, cela ne passe pas par des tuyaux, mais enfin quand même, ça doit bien finir par parvenir à destination, des fois, dans quel état, c’est une autre question …
Il y a encore du soleil, descendez donc moi ces pâtes de cette étagère maudite, ou attrapez une pince spéciale « je ne peux plus trop saisir, en haut, en bas.
J’en ai une, ça sert aussi de matraque en cas de encontre médicale antipathique.
Double utilité.
Il y a encore du soleil, dehors, tout le monde, la campagne est là.
traitez-vous avec douceur.
Cordialement,
Dunes.
je mets dunes, je n’ai pas l’intention de prévenir, je n’ai pas fait mon cancer-outing professionnellement, je ne les aime guère, trop militant pour ça.
J’espère qu’ils me le rendent bien.
Ma,
Fuck Carlo…
Tu es toujours dans mes pensées, même si je ne suis plus trop présente sur la toile.
En tous cas, j’espère que tu peux toujours sourire….J’en suis sûre, même!
Alors, Frau Blucher, always and forever!
xoxoxoxo
A
En tous les cas, cette chronique nous laisse un sourire, et ça vous le pouvez ! Et c’est cool.
Bonsoir Manuela,
Lectrice depuis le début, compère dans vos rages, votre humour, votre force, vos douleurs, je suis toujours inquiète et tellement impatiente de vos nouvelles. Je sais ces défaillances qui croissent et ces jambes qui se défilent, ce constat et cette rage de ne plus pouvoir faire, cette capacité à relativiser en se disant… Ouais mais t’es encore là… Et cette lassitude aussi. Pas grave pour les lasagnes, se faire un petit thé, se laisser vivre parce que plus que jamais c’est de cela dont il s’agit : un sourire, un oiseau qui passe, un arôme…. Je vous embrasse Manuela
FUCK la maladie, ce crabe qui bouffe les malades de l’intérieur.
Pour l’instant je suis passée à coté mais contrairement à cet homme pour sa femme, jeune femme de 30 ans, j’ai mis ma vie entre parenthèse pour me consacrer à mon père atteint et découvert en stade terminal.
La pour faire à manger, alors qu’avant lui cuisinais, la pour manger avec lui, la à chaque hospitalisation tout les jours, en courant du travail à l’hôpital, sortant après les dernières heures de visite, juste pour attraper le dernier car qui me ramenait chez nous (je vivais chez lui).
Je l’ai accompagné, souvent apprise avant lui les mauvaises nouvelles, mais demandant au corps médical de faire son travail en l’informant de sa maladie.
Par contre j’ai tenu à lui dire avec mes mots qu’il ne guérirait pas au moment ou il était près à l’entendre, pour lui dire qu’on avait une chance à saisir, pouvoir se dire au revoir, se dire les mots que la pudeur m’empêchait de dire.
Je lui ai dis que je n’avais pas à lui pardonner quoi que ce soit quand il a décidé de ne plus lutter (métastases au cerveau et os), je lui ai dis de retrouver sa maman le dernier jour car sa souffrance était visible.
Juste être la sans plaindre, mais le faire rire, juste être la pour qu’il ne se sente pas seul.
Je comprends votre désarroi de voir qu’on arrive plus à faire ce que l’on faisait avant sans même y réfléchir. J’ai lu cette colère chez mon père quand il s’est vu diminuer, et de manière rapide.
Je ne lui ai jamais dit ce n’est pas grave, on trouvera une autre solution.
Je lui disais « Tu sais Papa, moi, je t’aime » maintenant comme avant.
Et je suis contente de lui avoir fait ce cadeau, regarder la maladie en face et rester présente en lui tenant la main;
Moi vois-tu, j’avais préparé ma retraite : Sculpture, dentelles au fuseaux, crochet, tricot…etc.
Le cancer s’est attaqué à mon sein droit et à mon bras droit :9/12 ganglions atteint, un phase 4…
Après l’opération, je n’ai rien eu pas de psysio…rien…
Maintenant 9 ans sont passés. J’ai recommencé à tricoter au crochet, 5 puis 10 puis 15 minutes…très très graduellement, après plusieurs essais et échec, 4 ans après l’opération…
Entre temps, j’ai fait de la généalogie, j’ai lu, je me suis occupée pour ne pas sombrer…
Mon ordi. en a pris des chocs et le 2ième a eu besoin d’un kit de survie, et ma tablette par la suite aussi…ils se ramassaient le plus souvent par terre…
Moi aussi, plus d’équilibre…Mon conjoint m’a fait un petit escalier…et il se vend une espèce de pince pour les articles en hauteur, regarde dans le Net pour appareil pour handicapé…
Oui, c’est frustrant, moi, je travaillais et le vendredi soir, c’était le grand nettoyage, 2 heures et la maison était propre…Aujourd’hui, je dois prendre la journée pour juste lavé le plancher de la cuisine…15 minutes et arrêt de 30 minutes pour reprendre mon souffle…
Mais je m’encourage en me disant que mes enfants ont mis 9 mois à apprendre à marcher, alors il faut pas vouloir reprendre le temps d’avant pour tout…
C’est difficile, je le sais…Ouvrir un pot m’est toujours impossible, alors si j’ai personne pour m’aider, je change le menu prévu…Maintenant la bonne sauce à spaghetti se fait en famille, si vous en voulez, impliquez-vous, je ne peux plus tout faire…
Oui, beaucoup de frustration, mais la colère ne donne pas grand chose,sinon te mettre à dos tes proches…
Moi, quand la température change, mon corps me fait mal de partout…J’ai trouvé un truc: une cape d’Alpaga, c’est merveilleux, je me roule dedans, et je m’occupe sur l’ordi pour ne pas devenir folle.
Il faut se donner des petits trucs pour s’aider…
Pas facile, mais pas impossible…Bonne chance à toi et un jour à la fois…
Dans quelques jours je passerais avec mon Mac Gyver de mari tu prépare une liste de bricolage qui peut te faciliter la vie
Tu viens simplement de mettre des mots sur tes maux, sur ce que tu ne peux plus faire, les choses simples qui deviennent si difficiles à accomplir … oh ce n’est pas pour te plaindre tu es tellement au dessus de cela, non juste pour témoigner sur ce que le cancer peut détruire … et ce témoignage, douce Manuela, permettra à celle qui te lit, à celle qui comme toi, maintenant, plus tard criera
ce « je ne peux plus » de comprendre qu’elle n’est pas la seule, que d’autres ont connu ce tsunami du corps mais non de l’esprit capable encore et toujours : d’analyser, de gérer et de rebeller …
Comme tu as bien fait de venir nous le dire … oui tu es là mais le cancer aussi nous as tu dit … là, tu nous le dis autrement et nous l’entendons <3 Je t'embrasse affectueusement et je t'envoie toutes les pensées positives dont tu as tant besoin …
Y a des jours comme ça où on n a pas assez de cailloux ( Forest gump)
Fuck les chaises qui deviennent ingrimpables sans autorisation :(
<3