Une ambulance sur l’autoroute du soleil, une ambulance qui remonte vers le nord. Dedans il y a un vieux monsieur, mon père.
Voilà ça a tenu huit mois depuis la consultation ratée avec le généraliste cannois. Cannes cette ville où il semble difficile de trouver une bonne prise en charge pour les vieux messieurs. Pourtant des vieux, il y en a plein les maisons, plein les EHPAD, plein les appartements, plein les terrasses, des vieux plus ou moins en bon état. Cannes cette ville qui n’est pas un désert médical mais où les cliniques s’autoproclament hôpital et où la prise en charge est loin d’être suffisante. C’est là que le médecin généraliste a fait admettre mon père après un épisode médical où le toubib de SOS médecins appelé en urgence par les pompiers a diagnostiqué un torticolis. Je n’ai toujours pas compris pour quoi le SAMU n’était pas intervenu, les mecs devaient être sur les routes à ramasser les morceaux des aoûtiens en transhumance. Le gars a prescrit du paracétamol et est retourné soigner les coups de soleils des touristes.
L’IRM qui a suivi a bien montré qu’il s’était gouré le gars de SOS médecins – Cannes et que le paracétamol sur une colonne vertébrale rongée par l’arthrose et fracassée par une mauvaise réception dans un fauteuil et un coup du lapin, ça ne soulageait pas. Donc trois jours plus tard il était sous Fentanyl et cortisone, le vieux monsieur, avec une minerve.. et sa douleur qui ne passait pas. Deux semaines plus tard son état s’est dégradé. C’était prévisible. Pas encore assez de Fentanyl pour l’apaiser pas assez de soins pour le calmer et » de toute façon il faut libérer la chambre ». La médecine à Cannes, pour ce que j’en ai vu je te conseille d’éviter.
Aujourd’hui une ambulance va traverser la France. Dedans il y aura mon vieux papa qui remontera direct vers sa ville natale, ça n’est pas encore son dernier voyage mais il n’en sera pas bien conscient. Depuis le début du mois d’août son cerveau rétréci par l’âge et la maladie ne fonctionne que quand il le veut bien et encore le logiciel reboote trop souvent. Parfois il reboote avec un écran bleu et il faut attendre un long moment avant que l’écran d’accueil ne daigne se pointer. Le disque dur est mal rangé, il manque plein de fichiers, la mémoire vive est grillée. Le corps est amaigri, il commence a porter les traces d’un alitement prolongé, du manque de soins, de l’absence de nursing. Bref il fallait le sortir de là, ça n’était pas un endroit pour une fin de vie paisible.
Il y a presque quarante ans la femme du vieux monsieur s’en est allée. Si il existe un ailleurs, elle ne va pas tarder à le voir arriver et il risque de prendre cher. Pas pour le retard. Non, pour tout le reste. Si il existe un ailleurs.
Pour en revenir à l’ambulance.. non rien.
Tes récits sont toujours aussi touchants et bien écrits… J’ai des souvenirs assez similaires avec le mien mais après plus de 4 ans passés sans lui, je me fais la réflexion dernièrement qu’ils m’avaient permis de profiter encore un peu plus de lui, que nous ayons pu nous dire au revoir et le laisser partir de façon sereine : régler les dernières « factures », se dire qu’on s’aime, se voir confier une tâche importante que je suis en train de finaliser etc.
Chaque famille est différente et chaque fin également… Je vous souhaite qu’elle se fasse en tendresse et sérénité.
Je t’embrasse,
Florence
PS : j’aime beaucoup l’illustration que tu as choisie car elle est forte et pleine de sens… L’accompagnement…
Merci pour votre message, mais il n’est pas question de courage, enfin pas pour moi.
Effectivement ne jamais être malade sur la côte dites « d’azur » surtout si vous êtes âges …
Allez Manuela, encore un peu de courage qu’en fouillant un peu ( ou beaucoup) tu finiras bien par trouver