Chère Madame Jolie-Pitt,
Je viens de lire votre tribune dans le New York Times ce matin où vous expliquez votre choix d’ovariectomie prophylactique. Votre décision s’ancre dans la logique de la diminution des risques de développer un cancer et fait suite à votre précédente chirurgie – une double mastectomie. Vous êtes porteuse d’une mutation génétique qui vous prédispose à ces types de cancer vous l’expliquez fort pédagogiquement aux lectrices et lecteurs. Vous notez qu’il n’est pas possible de supprimer tous les risques et que votre décision de conserver votre utérus n’est pas sans conséquence.
Il y a une vingtaine d’années, j’avais 31 ans j’ai été opérée et un cancer de l’utérus à un stade précoce a été détecté, le chirurgien et l’équipe qui me soignait n’a pas jugé opportun de me communiquer que ce cancer était hormono dépendant, je ne sais même pas s’ils en avaient connaissance. Mon chirurgien après avoir enlevé l’utérus, a également préféré enlever une marge de tissus atteints à savoir le col de l’utérus et un morceau de mon vagin. Il a laissé mes ovaires à leurs places jugeant que j’étais trop jeune pour être ménopausée. En 2013, vingt deux ans après ce premier cancer, j’ai été diagnostiquée pour un cancer du sein hormono dépendant lui aussi. J’ai opté pour une double mastectomie radicale mais sans reconstruction. L’équipe de cancérologie qui me traite a décidé de me castrer chimiquement et induit une ménopause que je croyais déjà effective, à tort.
Ce matin alors que je twittais le lien vers votre article j’ai reçu une réaction fort peu amène à votre sujet. Quatre mots, quatre mots blessants.
Ce message sûrement irréfléchi, se voulant drôle et provenant d’une femme m’a amené à vous écrire.
Nous sommes des milliers de femmes ayant choisi, ou subi d’être opérées et que la chirurgie a privé des organes symboliques de la féminité. Vous représentez pour de nombreuses femmes un exemple de féminité, de nombreux hommes aussi sont sensibles à votre beauté. Vos prises de paroles successives ont permis à certaines patientes de se faire dépister et selon les pays elles ont pu accéder aux tests ou non. Elles ont ensuite dû, comme vous, faire des choix, souvent difficiles et toujours anxiogènes. Beaucoup saluent votre courage, beaucoup vous critiquent. Seules les malades et leurs familles connaissent la réalité de ses choix et les conséquences qu’ils déclenchent.
Je voulais juste vous remercier, votre parole et vos choix permettent une prise de conscience des risques de cancer. Parfois les chirurgies prophylactiques sont le reflet d’un désir de perfection et ne se basent sur aucun risque réel, parfois elles sont une nécessité. La responsabilité des équipes médicales est d’aiguiller le choix des patientes en les informant. J’ai la certitude que vous avez soigneusement pesé les conséquences de vos choix à chacune des étapes.
Permettez-moi, Madame Jolie-Pitt, de vous souhaiter une longue vie auprès de votre famille nombreuse, je vous souhaite une ménopause pas trop pénible et de beaux projets à réaliser. J’ai pour ma part quatre enfants et quatre petits-enfant, j’ai cinquante cinq ans et souhaite vieillir encore un peu avant de tirer ma révérence.
Sincerly, yours
Manuela Wyler
Superbe billet !