A quelques jours de la sortie de Fuck my cancer le livre, je vous propose, chères lectrices et chers lecteurs fidèles du blog en exclusivité un extrait des premiers mots de mon récit. J’attends votre récit de diagnostics, vos premières réactions dans les commentaires.
A vos claviers et rendez-vous en librairie le 29 avril.
Tout a commencé un jeudi, dans une cour intérieure, derrière la porte qui me séparait du trottoir d’un boulevard parisien. Je sortais d’un cabinet de radiologie, je tenais dans une main les comptes rendus de ma mammographie et de l’échographie de mes deux seins. Je comprenais chaque mot du document, et même si le mot cancer était absent du texte, il se dessinait en gras et clignotait dans ma tête, accompagné du mot danger, écrit en capitale. Je sais c’est déroutant, mais je suis aussi la fille qui rêve en VO et avec un générique de fin.
Au bas du courrier, il était écrit « ACR5 » à la rubrique « classification du résultat ». ACR 5, c’est mauvais, très mauvais.
Dans ma tête, ça se bousculait, et la seule question qui émergeait en boucle était : Qui tu connais, qui tu connais ? Oui, je me tutoie. Je me connais assez intimement pour ça.
Et là, une réponse, comme une bulle dans une bande dessinée : un visage et un nom, un professeur de cancérologie avec lequel j’avais échangé épisodiquement pour des raisons professionnelles, autant dire sur un sujet qui n’avait strictement aucun rapport avec mes seins.
J’ai posé le dossier mammographie au sol. Il n’y avait ni banc ni chaise dans la cour. J’ai vérifié mon répertoire téléphonique et appelé un ami. On ne jouait pas à Qui veut gagner des millions, mais à Qui a le numéro de téléphone direct du spécialiste cancer. Et ce n’était pas un jeu.
[…]
Dix minutes se sont écoulées. Une réponse au premier mail et deux clichés photographiques des comptes rendus d’examens plus tard, toujours dans la cour du cabinet de radiologie, je devais écraser le cinquième mégot de cigarette quand j’ai reçu l’appel du professeur P.
J’ai lu le compte rendu. Ma secrétaire vous appelle demain matin et vous fixe LE rendez-vous au Centre Léon-Bérard dans le service spécialisé.
Je réponds par les formules de politesse et de gratitude en usage. Raccrocher et appeler mon mari. J’ai attendu d’avoir la solution pour le prévenir…
Nous étions tous les deux en déplacement professionnel et, par chance ou par hasard, tous les deux à Paris, où nous devions rejoindre l’un de nos enfants et sa petite famille pour une soirée qui aurait dû être joyeuse. Au téléphone, je tente de garder une voix normale pour lui annoncer qu’au jackpot, on vient de gagner le gros lot. Parce qu’une nouvelle pareille, cela nous concernait tous les deux.
Et puis je rentre à l’hôtel à pied, au soleil de juillet. Les soldes s’étalent partout dans les vitrines. Aucune envie de shopping. Je me dis que cette fois la nouvelle est grave. Côté cancer, j’ai déjà donné vingt ans plus tôt pour la version light d’un cancer de l’utérus. Une version light, c’est quoi ? C’est celle qui ne nécessite pas de chimiothérapie.
Je me suis remémoré la chirurgie et ses suites, pas si légères en définitive. Couchée un mois, avec quatre enfants encore très jeunes. J’avais trente-deux ans, et je devais faire le deuil d’une hypothétique nouvelle grossesse. J’avais mis plus d’un an à me relever moralement. En cadeau surprise : une belle dépression, amplifiée par le décès de mon beau-père chéri. Un cancer aussi.
J’ai pensé au cancer des ovaires de ma belle-mère, décelé trop tard, à sa fin de vie, l’ascite dans les poumons, les ponctions, la morphine, et à sa mort assistée. J’ai pensé au cancer du sein, aux métastases cérébrales et à la mort d’une amie d’enfance. J’ai aussi pensé au cancer du pancréas de ma marâtre, et je me suis dit que je n’avais pas tiré le plus mauvais des cancers à la loterie. Puis j’ai cessé de dresser cet inventaire morbide – cela s’avérait sans fin, et à ce stade, essayer de positiver était juste une aberration.
Parfois, on ne maîtrise pas les stratégies que son cerveau met en place pour tenter de canaliser le stress. Et là, niveau stress, j’étais au maximum de charge supportable. Enfin, je le croyais…
De retour dans la chambre d’hôtel, j’ai ouvert le minibar et me suis versée un Jack Daniels. Normalement, je ne buvais jamais d’alcool dans la journée, et rarement le soir. Mais nous n’étions déjà plus dans une situation normale.
Avant de boire mon verre, j’ai appelé mon médecin généraliste, qui était absent, et pris rendez-vous avec sa remplaçante pour le lendemain matin, à l’arrivée de mon train. Je savais que les quelques jours qui me séparaient du prochain round médical nécessitaient un peu de soutien chimique, et une consultation s’imposait. D’ordinaire, j’aurais attendu le retour de mon médecin. Je n’aimais pas consulter les remplaçants. Mais à nouveau plus rien n’était ordinaire, et je sentais qu’il y avait urgence.
Après le verre, j’ai commencé à pleurer. Comme si une soupape de sécurité lâchait, les larmes coulaient. Pas de hoquet, pas de chagrin. Non, juste des larmes.
Communiqué de presse ici
Pour commander Fuck my cancer en version papier ou numérique retrouvez sur le site des éditions Fayard les différentes plateformes des libraires en ligne ou encore mieux poussez la porte de votre libraire et ne vous privez pas du plaisir de dire FUCK MY CANCER bien fort.
Bonjour Laure
Merci pour votre message. Je ne pense pas que ce soit une excellente idée d’offrir un livre traitant du cancer à un ami en deuil. En fait je pense que c’et vraiment une très mauvaise idée, par contre si vous voulez comprendre ce que c’est que d’être malade et soigné pour un cancer, ce que le père de votre ami a pu endurer là je pense que cela a un sens d’acheter mon livre.
Pour ce qui est de comprendre le deuil il existe quantité de livres, mais ce dont votre ami a besoin c’est d’une présence chaleureuse et amicale.
Voilà c’était ma minute Dr Ma
Bonjour Manuella,
J’étais en train de chercher sur le net un bouquin à offrir pour une collègue qui vient de perdre son papa du cancer de la prostate. Et je suis tombée sur le synopsis de votre bouquin qui a retenu mon attention. Mais j’aurais voulu savoir si vous pensez que votre livre peut aider les personnes qui ont perdu un proche à cause d’un cancer. En faite, mes parents ne m’ont pas apporté d’éducation pour appréhender la mort c’est un sujet tabou à la maison. Du coup, quand j’ai un ami qui perd un proche j’ai toujours peur de mal faire.
Hâte d’avoir votre point de vue
Laure
Oui on a juste besoin de continuer à vivre dans ce combat….même avec les effets secondaires même sans cheveux sans cils sans sourcils….et avec cette amputation….vivre rire aimer et combattre….merci
Bonjour Mme Wyler,
Votre bouquin est arrivé hier par le courrier de midi, comme prévu (quelle précision ces pré-commandes quand même !). Je l’ai posé exprès sur le bureau, à coté du pot à stylos, pour qu’il soit vu et pour que je puisse moi aussi le regarder et le feuilleter tout l’après-midi entre deux tranches de vie, entre une couche de pur bonheur et une galère de frustrations, entre des gazouillis innocents et des larmes retenues, entre une incertitude réconfortante et une vérité effrontée. Je suis rentré trop tard hier soir pour lire vos pages mais j’avais quand même réussi dans la journée à discuter avec ceux qui l’avaient remarqué sur les raisons qui m’avait poussé à acheter ce livre. J’attendais donc ce jour férié pour m’y plonger et je me suis endormi en me disant que cancer du sein et premier mai avaient çà en commun de n’être certainement pas des histoires de fleurs mais bien des histoires terriblement sérieuses de souffrances, de luttes, de droits, de morts.
La raison principale qui m’a fait commander votre livre n’est pas son thème, encore que je suis particulièrement intéressé et impliqué dans la lutte contre les dégâts qu’occasionnent ce fléau et l’église de dépistologie qui l’érige en péché originel. La raison est d’abord votre qualité d’auteure-patiente. Tout simplement parce que mon travail quotidien consiste à me nourrir (avidement) auprès des gens d’informations que je transforme en autant de formations qui m’aident un peu plus chaque fois à les aider en retour quand je les rencontre. Je n’y peux rien, je suis une espèce de machine à empathie. Alors, vous pensez, lire une telle mise en situation ne devrait être pour moi qu’un acte supplémentaire et nécessaire de formation professionnelle continue.
J’ai donc dévoré …et adoré votre livre !
En plus d’une lecture plaisante et facile, moi le paresseux de nature qui préfère la vulgarisation et son accessibilité à la pédanterie de la dernière mise à jour d’une recommandation scientifique, j’y ai puisé de nouveaux mots, de nouvelles idées, de nouveaux faits avérés et utiles à mes prochaines relations avec des gens touchés comme vous par ce fucking cancer-là mais touchés aussi par d’autres misères médicales ou médico sociales comparables. Je ne vous ferais pas l’insulte de vous féliciter pour la justesse du ton et des propos, vous êtes bien mieux placée que moi pour définir et apprécier cette justesse, je me contenterais de vous dire que cette justesse, à la côtoyer tous les jours dans les mots de ceux qui me font l’honneur de me les livrer, m’a attristé, ému et révolté.
J’ai bien sur été ému par votre parcours, vos bagarres et vos colères, encore plus par la description de tous les petits bonheurs simples que les soins et les soignants n’ont pas réussi à vous confisquer, encore plus par la fraicheur de votre rapport hédoniste au corps (j’ai adoré la lettre d’adieu à votre poitrine) et par la formidable solidarité familiale que vous savez cultiver avec simplicité (et, si j’ai bien suivi, avec quand même plein de bons pots de confitures qu’on a envie de déguster).
A la fin de ce livre, j’ai été par contre bien triste d’appartenir moi même à la famille de ceux qui sont de l’autre coté des bureaux que vous avez voulu renverser avec raison de temps en temps. J’ai été ému de vous trouver finalement encore généreuse, posée, tolérante, malgré vos coups de griffes précis et judicieux, malgré vos douleurs, malgré vos humiliations, devant les inconduites fréquentes d’un corps soignant pareil, presque tout le temps arrogant et pédant, souvent irresponsable et inconscient des dommages collatéraux de ses actes et parfois responsable et conscient névrosé des perversions de ses traitements soi-disant réfléchis, concertés et partagés (entre eux).
Et comme chaque fois que je lis ou entends un tel témoignage, j’ai honte. J’ai honte d’appartenir à un groupe dans lequel je ne veux pas me reconnaitre et dont une partie au moins, formée dans une violence hors de tout contrôle, ne sait pas, ne veut pas ou ne peut tout simplement pas se remettre en cause, étant incapable de reconnaitre ses erreurs, ses errances, ses approximations, ses maltraitantes et n’ayant aucune idée de ce que s’excuser veut dire.
Alors bien sur, à lire et entendre tant de comportements anormaux voire amoraux, je me demande ce que je suis moi-même et pour m’en sortir, je transforme un peu plus tous les jours cette honte en révolte contre mes pairs et j’apprends un peu plus encore tous les jours, non seulement à partager le soin à une personne en souffrance mais aussi à m’excuser pour tous les ratés que moi ou ceux à qui j’aurai confié cette personne auront déclenché.
Merci beaucoup pour cette grande leçon de médecine que tout soignant ou étudiant soignant devrait intégrer dans sa formation (à peine lu, je refile votre bouquin à mon interne).
Merci pour toutes celles et ceux qui ont vécu ou vivent ce que vous nous racontez là, dont j’ai partagé ou partage encore une tranche de leur vie et à qui je ne manquerai pas de proposer votre témoignage pour les aider à vivre, survivre, se battre, se défendre, comprendre.
Portez vous encore longtemps aussi bien !!
Thierry GOURGUES
médecin généraliste
Bonjour Lena
Vous avez tout bon: être présente , savoir écouter, ne pas juger, proposer de l’aide concrète, la faire rire parce que oui c’est injuste mais ça n’empêche pas de se marrer même en sanglotant parfois ! Merci de me lire
Bonjour Manuela,
Hasard du web, je me retrouve à lire vos lignes. Elles font écho à une situation personnelle, une proche est atteinte d’un cancer du sein. Alors je vais vous lire. Parce que ça m’aidera à peut être comprendre ce qu’elle traverse, même si je ne comprendrais même pas ce qu’elle ressent parce que je ne suis pas à sa place. Parce que j’ai envie d’être là pour elle, pour ses enfants, pour sa famille. Parce que je ne me “bats” pas à sa place comme je l’ai déjà entendu, mais que je voudrais la soutenir dans ce périple médical et moral. Parce que même si je trouve ça injuste, cruel, dur et putain de chiant de merde, c’est sa réalité. Alors j’ai juste envie de vous dire merci.
Manuela,
J’ai hâte de te (re)lire en version papier…
Fan d’un jour et Frau Blücher toujours!
hâte de lire ;)