LL’ennemi c’est l’ennui, l’ennemi c’est l’inaction, alors me revoilà. Dans le billet de juin j’avis prédit que je risquais de revenir. J’ai passé l’été qui n’est pas encore fini et c’est bientôt la rentrée pour les bien portants. Je ne rentre nulle part, je ne saute pas de classe. Je ne redouble pas non plus. Je suis statique dans la zone grise de l’attente. C’est tellement compliqué à gérer l’attente, l’attente de la mort, l’attente de la dégradation de plus, l’attente d’un symptôme, d’un signe d’évolution. En attendant tu ne peux pas faire de projets, peut-être à très court terme, demain la semaine prochaine au-delà tout devient incertain.
Une semaine de temps à autre la méningite se réveille et hop on consulte et on augmente les corticoïdes, qu’on diminue un peu plus tard. C’est un cycle. Douleurs, antalgiques et cortisone : ça monte ça descend comme la marée.
J’aurais pu partir en voyage mais je n’ai plus le droit de prendre l’avion en raison des risques entrainés par la pressurisation de la cabine. On m’a expliqué, j’ai râlé, j’ai redemandé une nouvelle fois on m’a expliqué, j’ai râlé. J’ai fini par capituler. J’ai envie de m’échapper de chez moi tout en sachant que c’est le meilleur endroit pour moi, le silence de ma campagne, mes repères sont là, je suis en sécurité mais mon univers est un peu trop restreint. Je ne conduis presque plus, juste de quoi nourrir mon besoin d’autonomie. Je rends les armes avec difficulté. Certains jours je m’ennuie ferme, plus envie ni la force de faire des confitures, plus envie ni la force de me lancer des défis en cuisine, plus envie ni la force de combattre les moulins de roses et avec tout cela le temps passe et octobre Rose se profile à nouveau. Je risque d’être encore en vie.
Je me dégrade par petites touches, le cancer en version pointilliste. Tantôt une nouvelle métastase cutanée apparait tantôt c’est un spasme musculaire qui me broie simulant un infarctus. Ce cancer est plein de ressources il me surprend encore. Cela fait trois ans que j’ai commencé ma vie de cancéreuse et presque six mois qu’on m’a annoncé la fin. Normalement je devrais déjà être partie mais non je traîne, je lambine. J’ai donc décidé de reprendre l‘écriture ici les jours où cela ira, sans pression. Je ne sais pas encore sur quoi je vais écrire mais cela viendra.
Voilà je voulais vous prévenir, je suis encore là et mon cancer aussi.